Petit manuel de survie à "La vérité si je mens ! 3" au bureau

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Sur l’affiche, les acteurs nous disent « La vérité vous nous avez manqué ». Pas sûr que ce soit réciproque. Parce que LVSJM, c’est un film mais c’est aussi :
– Une bande d’acteurs qui va truster tous les plateaux télé (sauf ceux  du « Jour du Seigneur » bien entendu) et toutes les colonnes des journaux (sauf celles de « Minute », quoique…)
– Des teasers qui tournent déjà sur Internet à la vitesse d’un joint dans la fosse d’un concert de Joey Starr
– Potentiellement des millions de spectateurs (le 1er ayant fait 4,8 millions d’entrées et le second plus de 7 millions)
Résultat : tu vas en boire jusqu’à la lie. L’accent pied-noir mal imité à faire mourir de honte Robert Castel et Marthe Villalonga va connaître une très forte inflation sur le marché de la vanne. Mais attention, méfie-toi des tribulations d’Eddy, Dov et Serge, car pour toi, pour moi et pour tous nos coreligionnaires qui ne travaillent ni dans une école juive ni dans une épicerie du XIXe, ce film peut flinguer ta vie professionnelle.  Oui, même toi, qui a survécu socialement à la machine à café à l’opération Plomb Durci, à la rupture de Gad Elmaleh et Marie Drucker, aux dernières manifestations des orthodoxes de Beth Shemesh. Tiens-toi prêt(e), l’attaque consciente ou pas, perfide ou juste idiote, viendra de toutes parts. Pour t’y préparer, voici mon petit manuel de survie.
 
La secrétaire : blonde, 32 ans, rentre dans un 36 aussi facilement que dans le bureau du boss. Un aplomb inversement proportionnel à son CV. Elle rit très fort toutes les 10 minutes en ponctuant ses spasmes, de « Oh » orgasmiques suivis invariablement d’un « Moi j’adore rigoler. En plus il paraît que c’est bon pour la santé ». Après  avoir vu le film, elle gloussera, une fesse posé sur ton bureau, « J’ai ri, mais ri. Mais vous, vous êtes vraiment juive ? Parce que moi je vous trouve pas super drôle. Norbert, l’appariteur,  il est d’accord avec moi. Il dit que vous devez être « moitié-moitié ». Et dites-moi, je ne savais pas que José Garcia il était juif. Parce que je suis sorti avec un Garcia, c’était un espagnol.  Ben si j’aurais su, je serais restée ».
Que lui répondre ? Tout. Cette fille gobe n’importe quoi. « José Garcia il est juif, bien sûr. Son père c’est le grand rabbin Sitruk et sa mère c’est Rika Zaraï. Par contre, soyez gentille de pas le répéter, il n’aime pas qu’on en parle. Il a attaqué « Voici » la dernière fois qu’on a évoqué ça dans la presse, il a gagné son procès. Le juge a obligé le rédacteur en chef du journal à se circoncire ».
 
Le commercial : il te déteste, tu le méprises. La sortie du film est, pour lui, l’occasion de relancer l’offensive. Avant une réunion, il expliquera à tout le service sans te regarder directement, mais en te jetant quand même des petits coups d’œil, « Ce film c’est un peu comme un documentaire, ouais un peu comme Cousteau, mais bon vu leur niveau sonore, je vous rassure, c’est pas le Monde du silence ». En prenant l’accent moitié marseillais, moitié kabyle,  il se lancera dans une théorie hyper argumentée sur le mode : « Et puis leurs femmes, ça va, y a pas de quoi se taper le cul par terre. « Ah qu’elles sont jolies les filles de mon pays », Enrico faut t’acheter un chien d’aveugle, ou alors on a pas rencontré les mêmes ».
Que lui répondre ? Reprenez-la main illico en riant très fort et de bon cœur de l’autre bout de la pièce, « Ce Jean-Marc mais qu’il est drôle. C’est vrai que vous savez de quoi vous parlez. Jean-Marc, c’est son nom pour démarcher. Ben c’est sûr que c’est mieux que Shlomo Fitoussi pour vendre des assurances. Sandra du service compta, elle avait jamais vu un pénis aussi bien circoncis ».
 
 Ta manager : Elle a 2 ans de plus que toi. Pas de mari, pas d’enfant. Sa vie c’est son boulot. Même quand elle te raconte son week-end, on a l’impression qu’elle te fait un debrief-client. Elle a fait droit et HEC, alors tu te dis – bêtement – qu’elle a dû croiser des juifs sur les bancs de la fac. Tu ne le sauras jamais. En mode « question », elle mélange tout, autant par manque de temps que par inculture. « Chabbat ca tombe quand cette semaine ? Ca coïncide avec le ramadan, non ? C’est vos vrais cheveux, parce que j’ai lu que les israéliennes portaient des perruques et qu’elles se rasaient la tête en dessus ? Au fait, j’ai regardé le planning des vacances : vous partez à Eilat en avril ? Vérifiez quand même sur la liste du Quai d’Orsay, à mon avis ça fait partie des zones à risques. On n’est pas Areva, si vous vous faites prendre en otage par Al-Qaïda, on ne pourra pas accrocher votre portrait sur la face de la tour B, y a la campagne de rentrée. »
Que lui répondre ? Ne tentez pas d’argumenter point par point. Parez au plus pressé, il en va de l’image et de l’honneur de la communauté juive. Glissez-lui «Sonia, j’ai pris rendez-vous chez le coiffeur, j’ai le cheveu qui repousse sous la perruque, c’est très désagréable. Ça ne vous embête pas si je pars plus tôt ce soir ? »
 
Le responsable des études : féru d’histoire, passionné par la religion juive, il te pose tellement de questions talmudiques que t’as envie de lui filer le numéro du service des conversions du Consistoire de Paris. A chaque fois que Taddéi reçoit Tariq Ramadan, il t’envoie des textos à pas d’heure pour dénoncer l’antisémitisme latent de certains médias « subventionnés par nos impôts ». Il trouve le film très mauvais et pense que le CRIF devrait porter plainte. Pour ton anniversaire, il t’a offert l’intégrale de Levinas, et sur la petite carte qui accompagnait le paquet, il a écrit : « As-tu remarqué comme on dit que Chabbat entre et sort comme s’il s’agissait d’une personne qui emplit la maison de sa présence ? Un peu comme toi dans ma vie… »
Que lui répondre ? Soyez direct. « Stéphane, je te jure arrête ! En fait, tu m’emmerdes. Je veux pas voir les photos que t’as prises  à Jérusalem, je ne veux pas revoir avec toi « Le choix de Sophie » sur Arte, ni me balader dans le Marais. La dernière expo au Musée d’art et d’histoire du judaïsme ?  Je m’en contrefous. En fait, je vais te dire Stéphane, plus tu veux ressembler à un juif et moins tu me plais ».
 

The SefWoman

 
Ma philosophie se situe entre « A Kippour tout le monde pardonne, sauf moi » (Raymond Bettoun) et « Dieu n’existe pas, mais nous sommes son peuple » (Woody Allen)
 

 
 
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Article publié le 10 janvier 2012. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2015 Jewpop

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