Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les EEIF sans jamais avoir osé le demander

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Alors que nos scouts juifs nationaux sont affairés à célébrer le 90ème anniversaire de leur premier feu de camp vacillant, glissons-nous furtivement dans la meute de l’EEIF pour leur faire les poches. Nous allons tenter d’en savoir plus sur ces pseudos castor-juniors enjuivés.
 

Pourquoi portent-ils ces affreux mouchoirs bicolores autour du cou ?

Le foulard, c’est un foulard, abruti. Un triangle de tissu roulé et noué, un couple de couleurs par Groupe Local. L’EI arbore fièrement ses couleurs, car ce sont évidemment les plus belles. Moins clinquant que le gros h’aï du tune ventru en Marcel et pantacourt, moins grotesque que la cravate géante XXL du shassnik enchabbaté, moins humiliant que le jeans slim taille basse de jeune ballerine, dans lequel nos ados lippus et un peu gras s’exhibent le week-end sur les plages pourtant belles de Normandie. Mais tout de même plus flashy que la cravate griffée de l’ashké assimilé qui imagine que plus personne ne remarque son extraordinaire ressemblance avec les croquis anguleux qui illustraient les si délicats pamphlets qui nous furent dédiés sous maurras et pétain (l’absence de majuscules est volontaire, on ne peut pas tout avoir).
 
 

Ce sont des juifs déguisés en scouts ou bien des scouts déguisés en juifs ?

Ah, ça, c’est une bonne question. C’est pas si simple en fait. Un peu des deux, ça dépend de chacun, c’est ça l’astuce. « Sur un malentendu ça peut toujours marcher » nous chuchota à raison notre moustachu chauve et bronzé préféré. Un mot tout de même sur le drôle de judaïsme des EEIF. Depuis qu’un certain Moïse Lévi (Moshé est, rappelons-le, descendant direct de Levi – vous savez le fondateur de la tribu du même nom). Depuis donc que Moïse nous apprit que nous étions juifs (Salomon, vous êtes juif ?!?!), nous n’avons pas cessé un instant de nous tenir tous et toutes par la barbichette, animés par la farouche volonté de prouver que l’on est chacun mieux ou plus juif que l’autre.
 

 
2 juifs, 3 avis, ce n’est pas une blague, paraît-il. Moi tout seul, j’ai déjà du mal à me faire une opinion là-dessus. Pourquoi on parle de ça au fait ? Ah oui, Moïse, les tribus, les engueulades, les clans, les clashs. Et bien les EEIF ont inventé un truc de dingue : « Le Minimum Commun ». Une mixture maison des lois ancestrales qui permet à chacun de se sentir à l’aise, sans endoctrinement ni transgressions. Transposé à la nature, c’est une sorte de cinquième élément dans lequel peuvent respirer, converser et festoyer de concert la carpe, le faucon et le goret.
 
Robert Gamzon – « Castor Soucieux » – au début des années 1930, a imaginé, puis patiemment construit cet équilibre improbable, qui, en définitive, tient en peu de mots : de la nourriture cachère cuisinée comme nous l’a appris la femme du rabbin sur les bancs du talmud thora, les bénédicités mosaïques idoines (pour faire court, on va dire «brah’ot» ), une bonne petite tefila le matin pour enfin rentabiliser ta panoplie de bar-mitsva, kippa lycra blanche personnalisée comprise offerte par tonton Mordeh’aï, et puis bien sûr, le plus beau pour la fin. Le Chabbat. Le vrai, vous savez, celui où on éteint les tablettes et les smartphones, celui où l’on kiffe sans un flèche en poche, celui «des religieux». Enfin pas vraiment. Celui des EI, avec son authenticité plus décalée, plus primitive presque.
 

 
Faut pas croire pour autant que tout ça se vit sans heurt. Bien sûr que ça rue dans les brancards. Et c’est très sain(t) – dans tous les sens du terme d’ailleurs. Entre les gros-païens-grandes-gueules autoproclamés et les Ayathora pinailleurs, entre celui qui suffoque, victime visiblement d’écrasement thora-cique, et l’autre qui hurles « Assouuuur ! » (souvent à bon escient au demeurant. Mais bon, c’est pas une raison pour imiter la sirène d’un 4×4 de la police religieuse, si chère aux théocraties mahométanes). Avoir connu ce judaïsme EI est un atout formidable, une chance unique. Sans cette expérience, comment appliquer le principe essentiel de Haavat israel ? Comment s’aimer soi-même si l’on n’a pas appris à aimer inconditionnellement tout juif, comment s’engager si l’on n’a pas dans sa vie expérimenté un moment, un lieu où l’on peut réellement vivre ensemble. En commun. Un minimum.
 
 

Et ça rapporte combien ?

Alors là tu vas être déçu mon pote. C’est l’arnaque du siècle ce truc. L’animateur est bénévole. Il s’occupe des autres au même titre que l’on s’est occupé de lui. Et oui, ça existe encore des gens comme ça, si c’est pas malheureux !
 

 

C’est quoi cette histoire de totems ?

C’est rien. C’est secret. Ta gueule. Autre question ?
 

On m’a parlé de vos big têtes de nœuds…

Là il y a confusion. C’est nœuds et Têtes de Bigue. Vous voulez impressionner un EI, demandez-lui comment on fait une tête de bigue, puis laissez-le parler ; il en aura pour environ 10 minutes. Pas besoin d’écouter la réponse évidemment ; l’essentiel est que votre ami EI ne vous regardera plus jamais de la même façon car il vous aime à présent. Par votre question vous avez marqué votre intérêt pour un élément central de l’aménagement de tout camp EI.
 

 
Mais c’est quoi alors finalement ce truc ? Il s’agit d’un assemblage branlant de trois montants de bois mal dégrossis. Une sorte de trépied géant. On dispose deux trépieds foireux l’un en face de l’autre à 2 m de distance et on les relie avec des mauvais rondins que l’on recouvrira avec des tronçons de croûtes de bois afin de s’aménager table et bancs incorporés. Pour le vrai EI, seule une table ainsi façonnée est digne de supporter son séant. Et d’accueillir, à la lumière opaline d’un Lumo crachotant, un dîner shabbatique. Le dîner shabbatique mérite à lui seul un article complet ; aussi nous n’en dirons qu’un mot ici.
Le mot couscous.
Quoi de mieux effectivement pour symboliser l’union de la multitude qui se joue là. Le vrai couscous EI se déguste dans une assiette en carton détrempé, dans la pénombre, sur une table légèrement en pente (dans le meilleur des cas) et composée de bouts de planches bien disjoints. Ce qui doit arriver arrive, ils en mangent autant avec la bouche qu’avec les genoux lorsque le bouillon de légumes inonde invariablement leurs cuisses fraîchement shabbatisées.
Et tout cela grâce à leurs bonnes têtes. De bigue.
 
Mica Halber
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© photos : DR, dessins Mica Halber
Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2013 Jewpop
 
À venir :
C’est quoi cette odeur bizarre ?
Ça veut dire quoi « shabbatiser » ?
Je t’ai pas demandé une pelle, je t’ai demandé où étaient les toilettes.
Et ça se soigne ?
 
 
© photos et illustrations : Mica Halber, DR

Article publié le 16 juillet 2013. Tous droits de reproduction et de représentation réservés © 2016 Jewpop
 

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