Un rabbin peut en cacher un autre

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Les rabbins, c’est comme les formes de pâtes, y en a plein et même si elles ont le même goût, c’est idiot mais on a des préférences.

 
 

Le Grand Rabbin

Être rabbin c’était dans ses gênes. Son père, son grand-père étaient rabbins. Si sa mère avait pu, elle aurait été rabbin. Mais bon, comme c’est pas permis, elle s’est contentée d’être fille, épouse et frère de rabbin. Les réunions de familles ressemblent à un conseil du grand Sanhédrin. Sa vocation ? Il a eu autant le choix que la fille de Laure Manaudou et Fred Bousquet quand on l’a inscrite à la piscine. Pour maintenir le pedigree familial, il a épousé une arrière-petite-fille, petite- fille et fille de… rabbin, qui n’est autre que la sœur de son copain de chambrée au séminaire israélite de France. Son but : devenir Grand Rabbin et tenter un jour de décrocher le rabbinat de Paris et de France, ses jeux olympiques à lui. Il donne des cours aux titres si complexes que rien pour comprendre l’intitulé, il faut avoir préparé Polytechnique.

Sa manie : il laisse passer 22 minutes de silence entre ta question et sa réponse. Ses yeux plongés dans les tiens, il ménage le suspense façon huissier de la «Nouvelle star» ou remettant à la cérémonie des Césars. Résultat : quand il répond, t’as oublié ta question, ton prénom et même ton adresse.

La fois où il a failli raccrocher son houmach pour retourner à la vie civile : quand après un cours de 2 heures sur la Tsédaka comme allégorie de l’éthique de l’autre, une personne du public vient lui demander : «Ma femme achète tous les ans le CD des Restos du Cœur, c’est péché, non ?».

 
 

Le rabbin old school

Moyenne d’âge supérieure à 70 ans. Il dit qu’il est diplômé du rabbinat de Fès, mais que tous les documents ont disparu au tremblement de terre d’Agadir (ville située à 780 kms quand même, c’est pas de bol). En fait, il a autant de diplômes qu’Elisabeth Tessier. Ta mère ne jure que par lui. Il a été un peu chomer, un peu choret, un peu mohel, un peu conseiller conjugal. C’est un peu le couteau suisse des rabbins. Depuis 40 ans, il est de toutes les fêtes de ta famille. Il a circoncis ton frère, l’a préparé à sa bar mitsva, célébré son mariage. Il a été très vexé de ne pas circoncire le petit-fils. Faut dire que la famille est moyennement rassurée depuis qu’avec un scalpel à la main, il tremble niveau 8 sur l’échelle de Richter. On se demande encore s’il danse le Harlem Shake ou s’il est atteint de Parkinson.

Sa manie : pendant les mariages, sous la houpa, il se lance dans des discours sans fin où se mêlent Dvar thora et anecdotes private joke que seuls tes parents et tes grands-parents comprennent. Aux enterrements, il ne fait pas mieux. Le seul susceptible de comprendre ce à quoi il fait allusion, c’est le défunt.

La fois où il a failli raccrocher son houmach pour retourner à la vie civile : le jour où il a croisé dans les couloirs du Consistoire un jeune élève rabbin nommé en province exigeant une augmentation de salaire et un appartement de fonction, et expliquant que sa femme lui interdisait plus de 2 veillées funèbres dans le mois sous peine de divorcer.

 
 

Le rabbin moderne 

Jeune, plutôt beau gosse, il s’est longtemps destiné à une carrière d’universitaire avant d’annoncer à ses parents qu’il allait devenir rabbin. Quand il a pris sa décision, sa mère a pleuré en disant «comment ça, je ne peux pas casheriser la vaisselle Hermès que ton père m’a offert pour nos 30 ans de mariage ?». Son épouse a hurlé de rire en disant «porter la perruque ? Mais t’es pas bien, je viens de me faire un lissage brésilien !». Quant à son père, il a lâché «j’ai dit à ta mère, tous ces voyages en Israël à répétition, ca va mal finir !». Son directeur de thèse à la fac a fait une crise d’épilepsie en annônant entre deux spasmes «vous ne pouvez pas me faire ça, depuis que ma meilleure élève l’an dernier a décidé de porter le voile, je suis déjà la risée du corps professoral. Si ça se sait, je suis mort !».

Sa manie : choquer ses fidèles très pratiquants lui procure un plaisir limite sadique. Certains crient au blasphème, lui parle de «faire bouger les mentalités». Pour  ramener  ses coreligionnaires sur le droit chemin de la synagogue, le chabbat, il autorise les téléphones portables pendant l’office et a mis en place un vestiaire à l’entrée. En fait, seul son niveau d’anglais de redoublant de 5e l’a empêché de devenir un rabbin libéral.

La fois où il a failli raccrocher son houmach pour retourner à la vie civile : en apprenant la démission de Benoit XVI, il a été pris d’un grand moment de lassitude. La veille, une partie de ses fidèles avaient ouvert une page Facebook pour demander son départ. Bon c’est vrai que faire monter à la thora ce juif brésilien transsexuel la semaine du carnaval de Rio, c’était pas sa meilleure idée.

 
 

Le rabbin médium

Il n’a pas de communautés mais des supers pouvoirs, des visions, des flashs. Ça se transmet de générations en générations. Il dit qu’on vient le voir des quatre coins de la planète, mais c’est surtout de la région parisienne. Il n’a pas besoin de faire distribuer dans le métro des flyers où il promet, comme «le marabout Bakayoko», de faire revenir l’être aimé comme «un chien derrière son maître en 48h», sa réputation le précède. Son business fonctionne tout seul et son cabinet ne désemplit pas. Son secrétaire prend les rendez-vous et récupère les généreuses donations «pas obligatoires mais vivement conseillées».

Sa manie : pour des questions de rentabilité, il gère son agenda comme le responsable de la traçabilité chez Spanghero. Résultat, pas plus de 12 minutes par rendez-vous. Obligé d’aller à l’essentiel avec à la clé le même conseil. T’es atteint d’un cancer, tu t’entends pas avec ton mari, ta femme n’arrive pas à tomber enceinte, ton enfant sort avec un non-juif, t’es au chômage, quel que soit ton problème, «il faut vérifier les mezouzoths».

La fois où il a failli raccrocher son houmach pour retourner à la vie civile : ça fait 20 ans qu’il galère pour faire construire une yeshiva à Jérusalem (bonne idée et tellement originale) au nom du  vénéré Rav son papa. Quand il a vu le nouveau siège de la Kabbale à Los Angeles, il a frôlé l’AVC.
 
The SefWoman
Ma philosophie se situe entre « A Kippour tout le monde pardonne, sauf moi » (Raymond Bettoun) et « Dieu n’existe pas, mais nous sommes son peuple » (Woody Allen)
 

 
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© photo « The Frisco Kid » (« Un rabbin au Far West ») de Robert Aldrich, avec Gene Wilder
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